Avant de mettre fin à des relations commerciales clairement établies entre deux parties, il est impératif d’être prudent et vigilant quant à l’arrêt desdites relations. Alors que le principe reste la liberté de rompre, sans aucune motivation, il convient néanmoins de l’anticiper et d’en faire état par écrit à son cocontractant au risque d’être contraint de l’indemniser lourdement au titre de la rupture.
Comme souvent en matière contractuelle, c’est sous le prisme de l’article 1134 alinéa 3 du Code civil, relatif à l’exécution de bonne foi des conventions, que doivent être analysés les développements ci-après.
A cet égard, et sans surprise aucune, l’article L442-6, I, 5° du Code de commerce sanctionne fermement le fait de rompre brutalement, et ce même partiellement, une relation commerciale établie sans préavis écrit.
La possibilité d’échapper à cette disposition d’ordre public n’est envisageable que dans l’hypothèse où l’une des parties n’exécute pas ses obligations, caractérisant ainsi un manquement grave justifiant la rupture des relations sans aucun préavis, ou bien dans l’hypothèse plus rare d’un cas de force majeure.
La pertinence d’une telle disposition se traduit par la possibilité pour le cocontractant « victime » de la rupture d’anticiper la cessation de la relation commerciale et, par conséquent, de partir en quête de nouveaux partenaires et marchés prospères. C’est en réalité l’exigence de « bonne foi », prédominante lors des trois étapes de la vie d’une relation contractuelle (formation, exécution et cessation), qui transparait en filigrane de l’article susvisé du Code de commerce.
Un préavis raisonnable et notifié par écrit
En l’absence de dispositions contractuelles relatives à la durée du préavis, certains ont pu douter de la nécessité de respecter strictement les dispositions de l’article L442-6, I, 5° du Code de commerce.
Or, nonobstant l’absence totale de précision sur ce point, un délai de préavis suffisant et raisonnable doit être respecté par les parties, les magistrats ayant tendance à retenir de facto une durée d’un mois par année d’ancienneté des relations commerciales. A contrario, un préavis contractuel trop important au regard des circonstances de l’espèce peut être minimisé par la juridiction compétente.
A la lueur de la jurisprudence florissante en la matière, il est primordial que la rupture des relations commerciales soit notifiée par écrit (Cass. Com. 24 septembre 2013 – n° 12-24538). Ni une prétendue annonce faite verbalement, ni un ralentissement des commandes n’est susceptible de venir pallier l’absence de notification écrite.
Préconisation : une anticipation planifiée
Il convient de mettre en place des audits en amont quant aux contrats en cours d’exécution afin d’estimer le délai raisonnable de préavis à respecter et de peaufiner, antérieurement à la date effective de la rupture, tous les écrits nécessaires permettant de matérialiser la bonne foi et la loyauté du cocontractant au risque de se voir condamner à l’indemnisation du préjudice découlant de la brutalité de la rupture, et uniquement de la brutalité de celle-ci, la jurisprudence faisant fi des frais accessoires (déménagement, modifications diverses, etc.) liés à ladite rupture (Cass. Com., 10 février 2015 – n°13-26414).
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